Par Camille Loty Malebranche

La crise haïtienne multiforme, abyssale n’est pas du ressort de la mystique ou de la magie! Seule une prise en main rationnelle pertinente, intégrant le savoir et le savoir-faire et changeant radicalement de paradigme relationnel avec l’occident, sauvera Haïti ou Haïti disparaîtra. Aucune puissance mystique ou force supérieure n’y peut et n’y pourra strictement rien…

Le problème haïtien, la crise pluridimensionnelle haïtienne, ne se résoudra que par la raison froide et efficace! Ni la mystique ni la religion, ni un individu, ni l’étranger, ni aucun génie ou aucun dieu ou aucun loa n’interviendra dans la condition abjecte de l’homme haïtien contemporain, je veux dire de l’individu socialisé haïtien pour lui porter secours.

Dieu, Yahvé en qui je crois fermement et fervemment, n’intervient que dans la sphère strictement personnelle de l’homme de foi manifestant son sentiment de certitude en son Dieu, mais pas dans l’action ou l’inaction sociale des États et des Nations interagissant pour le meilleur et surtout, dans le cas d’Haïti, pour le pire et l’autodestruction collective. Yahvé, Dieu, le Créateur a déjà donné aux haïtiens – comme à tous les hommes de tous les peuples et nationalités – les facultés mentales et intellectuelles pour penser et construire par la mise en commun de l’intelligence et de l’action projective leur environnement, leur société, leur pays. C’est aux haïtiens de les utiliser – ces facultés universelles – de façon pertinente et particulière pour freiner et enrayer l’infamie de la condition haïtienne de pays pouilleux et infect en érigeant une société de justice et un État-Nation digne de leur humanité.

Dissension, incommunication, guerre de clans, opportunisme conjoncturel et culturel pour manipuler un peuple très émotif « roue libre » surnaturelle et démagogie idéologique, bref, du marronnage mystique ne sont que l’esquive magique du désespoir! Une esquive sur fond d’éludation du devoir de faire face donnant lieu à l’abandon au sort en voulant appliquer des expédients factices. Une esquive, une éludation séculaire qui a fini par détruire Haïti et la vouer au risque de la disparition comme pays.

Seule une culture défolklorisée, rationalisée, étendue dans le sens de la métamorphose radicale des mentalités et le changement fondamental des comportements peut sauver Haïti de ce gouffre pathologique et antisocial où ses élites indécentes, pour la plupart, l’ont placée et ne cessent éhontée de l’enfoncer. Ni élitisme ni populisme ne peuvent respectivement dans leur intumescence ou grivoiserie, délivrer la société de ses chaînes mentales culturelles quasi réflexes. La culture a pour vocation d’être non élitiste mais élitaire en tant qu’elle doit améliorer l’homme et l’émanciper pour la société en vue de le rendre plus positif dans le mitsein social et l’éthique nécessaire qu’implique tout mitsein (tout vivre ensemble). L’ « assingissement », cette manière de singes imitateurs et faisant le pitre, tel qu’il se fait de nos temps dans un monde haïtien si vide d’estime du soi ethnique et national, doit être répudié pour une posture humaine conquérante. Il faut que les intellectuels authentiques, les haïtiens mentalement libérés, les vraies élites aient le contrôle de l’État pour redonner à ce dernier la vocation d’instance dirigeante par la création des structures permettant les politiques rigoureuses du changement radical contre la vacuité d’État, mère de tous les vices, de tous les crimes, du néant de nation et de l’avanie miséreuse égrugeant la population interdite d’être nation! Comme disait Hobbes, « le bellum omnium contra omnes (la guerre de tous contre tous) constatée en Haïti, est indice d’absence de l’État ». Une absence responsable de toutes les ignominies allant de la misère extrême à l’infamie de la violence des gangs orchestrée par des forces de chaos planifié autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Haïti doit désapprendre le laisser aller « laisser grennen » pour apprendre l’action ordonnée, forte, salvifique qui doit être d’abord politique; une politique méliorative  de la téléologie sociale contre cette turpitude innommable, inqualifiable, ce nihilisme sociopolitique désappointant, cette désinvolture d’ingouvernance, cette légèreté des élus grivois qui y sévit. Une grivoiserie abominable qui  répugnerait même à des lombrics, où pourtant l’on a l’impression se complaisent nombre d’élus et d’éléments dit d’élite de l’économie.

Le relèvement d’Haïti est strictement entre les mains de ses citoyens, ses élites et eux, je pourrais dire elles seules mais je garde eux seuls et seulement eux en tant que citoyens assumant la citoyenneté surtout dans l’action politique, sans miracle, peuvent le possible. Ni dieux ni loas ni aucune prétendue entité mystique infraterrestre, terrestre ou supraterrestre n’y peuvent absolument rien. 

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE 



Source link